Ecole et Droits de l’Enfant

Un devoir aussi

Les jeunes représentent capacité technique et d’innovation, force de travail. Leur départ pour la ville ou l’étranger constitue une perte de capacité pour les populations rurales qui se sont souvent sacrifiées afin de leur permettre d’accéder à l’enseignement scolaire.

Le dilemne de l’Ecole : former, pour quoi ?

L’Ecole joue un rôle essentiel dans la construction de la personnalité d’un enfant et des motivations qui orienteront sa vie. Elle lui fait découvrir le monde qui se situe au-delà des limites de son terroir.

L’Ecole dispense les savoirs qui sont nécessaires pour construire l’avenir, nécessaires à ce qu’on appelle le ‘développement’. Malheureusement elle est aussi trop souvent la porte par laquelle les jeunes s’enfuient de leurs villages.

Ils s’enfuient parce qu’ils ne retrouvent pas dans ces enseignements les valeurs auxquelles se réfèrent leurs parents ; ils n’y trouvent pas non plus les repères et les outils qui leur permettraient de réagir à l’image négative de leur milieu que diffusent malgré leurs bonnes intentions trop de projets de ‘développement’.

Entraînés par l’esprit contestataire qui caractérise cet âge, c’est l’ignorance de leurs parents qu’ils perçoivent lorsqu’ils entendent ‘développement de capacités’, l’incapacité de leurs mères ou l’immobilisme de leurs traditions lorsqu’ils entendent ‘promotion de la femme’, l’action destructrice de leur communauté lorsqu’ils entendent ‘protection de l’environnement’.

Ils savent au fond d’eux-mêmes que cette vision n’est pas juste mais, ne pouvant y substituer une autre, ils ont honte de leurs parents et d’eux-mêmes, sont envahis d’un sentiment d’impuissance devant une situation qui les dépasse, qu’ils n’ont pas appris à maîtriser.

Il ne leur reste qu’à fuir.

Pressés de s’émanciper de ce monde qui leur semble hostile, le confort d’une ville dont ils ne voient que les parties illuminées et la liberté qu’ils croient pouvoir trouver dans l’anonymat de l’émigration leur paraissent promettre une issue définitive à la pauvreté. Ils se jettent alors sur le miroir aux alouettes de rêves d’ailleurs.

L’école partenaire du développement

La Déclaration des Droits de l’Enfant, dont l’étude est inscrite au programme d’Education Civique de l’enseignement primaire, énonce dans son dixième et dernier principe que « l’enfant doit être élevé dans le sentiment qu’il lui appartient de consacrer son énergie et ses talents au service de ses semblables. »

Rapportons cela aux enjeux du développement local : les sacrifices que font les plus pauvres pour permettre à leurs enfants d’accéder, entre autres, aux savoirs dispensés par l’école, exigent en retour respect, considération, et un réinvestissement de ces savoirs.

L’école a pour mission d’aider les jeunes qu’elle accueille à s’ouvrir au monde et à s’y intégrer. Mais la découverte par les jeunes des savoirs du monde ne doit pas être la source d’une rupture avec les savoirs et valeurs de leurs communautés, ni détourner leur regard des richesses de leur environnement ; l’école doit au contraire les encourager à les promouvoir activement.

Notre responsabilité à nous, porteurs d’initiatives de développement ou tout simplement parents, est d’établir dans l’environnement de l’école des dynamiques où les jeunes sont invités à s’investir et qui leur offrent en retour, pour la contribution qu’ils y apportent, la considération et la valorisation qu’ils recherchent.

L’enjeu est immense : la durabilité de nos investissements se trouve dans le regard que nos enfants porteront sur l’avenir, dans leur adhésion aux valeurs et leur appropriation des objectifs autour desquels leurs parents se sont mobilisés.


publié par   Bruno Legendre
le dimanche 15 mai 2011
 
 

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